Documentaire « Lettres du couloir de la mort »

Le 10 octobre 2022 dernier marquait la 20ème journée mondiale contre la peine de mort. À cette occasion a eu lieu sur la chaîne de télévision catholique française KTO, la toute première diffusion du nouveau film signé Léo Brézin intitulé « Lettres du couloir de la mort ».

Ce documentaire, que vous pouvez visionner ci-dessous, met en lumière le rôle des échanges épistolaires dans la lutte abolitionniste. À travers les témoignages d’avocats et soutiens de Charles Don Flores, d’anciens condamnés à mort, d’un philosophe, d’une conseillère spirituelle et des membres de l’ACAT- France, un kaléidoscope de perspectives diverses mais complémentaires révèle le parcours sombre des condamnés à mort.

Bien que Charles lui-même n’apparaisse qu’à travers une image et une de ses lettres, un de ses proches soutiens et un de ses avocats font des apparitions.

Journal de bord du 6 au 9 août 2020

Journal de bord du 6 au 9 août 2020

Jeudi 6 août 2020

Cela fait maintenant un mois d’affilée que nous sommes en confinement pour raisons médicales. Un ami ici m’a fait remarquer que ce confinement semblait sans fin. Je crois que c’est à cause de l’isolement total que nous subissons. J’ai la même impression et j’en suis venu à ressentir du dégoût vis à vis des avocats qui représentent chacun des détenus du couloir de la mort. On dirait qu’ils ne voient pas de problèmes à ne plus être tenu de passer davantage de temps à rendre visite à leurs clients et à communiquer plus avec eux. Comprenez bien que ces salauds cherchent toujours activement à nous assassiner tous. J’en bous de rage. Le juge, les procureurs et les avocats en appel se sont habitués à  “se la couler douce chez eux”, à travailler grâce à Zoom, etc. Et nous, nous sommes privés de communications dans ce nouvel ordre devenu « normal ». C’est un long tunnel obscur qui court devant moi, sans lueur à l’horizon. Tout ce que l’on peut faire, c’est continuer d’avancer. Le danger numéro un, ce sont les gens qui travaillent ici, et qui quittent l’unité chaque jour pour aller Dieu sait où, puis qui reviennent pour me contaminer peut-être au Covid-19. Nombreux sont les réfractaires au port du masque ; ce sont eux les plus dangereux de tous. Logiquement, ils ne portent pas de masque du tout en dehors de la prison, s’ils sont si réticents à en porter un au travail. Donc, ils vont attraper le virus puis contaminer tout le monde à la vitesse grand V dans le couloir de la mort du Texas. J’en ai froid dans le dos rien que d’y penser, mais c’est la triste vérité ici.

Vendredi 7 août 2020

Je me suis dis que je devais retranscrire plus en détail mon quotidien et l’impact de ce qui se passe dans le couloir de la mort du Texas sur ma vie en ce moment. Personne ne sait qui peut présenter des symptômes de la maladie, qui vivra ou qui mourra dans cette nouvelle réalité. Alors, si quoi que ce soit devait m’arriver, les autres sauront comment j’aurai été sacrifié. Ce matin, le commandant pénitentiaire a lancé l’ordre de faire prendre les douches. Puis, à 8 heures, les gardiens ont reçu l’ordre de nous escorter pour la promenade individuelle. J’ai passé un temps dans la salle de jour pour la première fois en un mois. J’ai porté mon masque pendant l’intégralité des 2 heures de mon temps de promenade. Apparemment, ils accordent un temps de promenade à seulement 25% de la population d’une unité à la fois. Au lieu de laisser les 6 sections (14 hommes par section) sortir de leur cage pour un temps de promenade. Deux sections seulement ont eu la possibilité d’avoir un temps de promenade. En l’espace de 4 heures, les promenades étaient terminées et plus personne n’est sorti. C’est sans queue ni tête, nous sommes tous des hommes placés à l’isolement, notre temps de promenade se prend seul, alors, pourquoi est-ce que seulement 25% des détenus du couloir de la mort on pu sortir de leur cellule pour la promenade ? Nous avons reçu ce soir un repas “chaud” normal pour le dîner, c’était nettement mieux que 2 sandwiches. A ce stade, la quantité de nourriture importe plus que sa qualité. Nous avons donc reçu un plateau complet de nourriture et tout le monde était content.

Samedi 8 août 2020.

Nous sommes déjà samedi et maintenant, on dirait qu’on entre dans une nouvelle phase de la vie du couloir de la mort du Texas. Quand je me suis réveillé, les gardiens escortaient les détenus pour leur douche tôt ce matin. Mais pas de promenade. Nous avons appris que tous les détenus qui travaillent dans le bâtiment, aux cuisines et dans l’équipe de nettoyage etc. avaient pu reprendre le travail.

Du coup, on dirait que c’est la bousculade pour “rouvrir l’unité”, mais de façon sélective, c’est-à-dire que les douches seront quotidiennes, mais qu’aucun temps de promenade ne sera accordé les sept jours de la semaine.

Nous avons reçu un sac en papier pour le petit-déjeuner mais 2 plateaux repas normaux chauds pour le déjeuner et le dîner. Les détenus habilités à travailler en cuisine sont de retour. A titre d’information, c’est pour eux plus économique de nous donner des repas normaux plutôt que tous ces sandwiches dégueu, donc ça leur va.

On a aussi appris que les amis et la famille du monde libre pouvaient de nouveau nous commander des colis alimentaires “ecomm”. On nous a dit aussi que la prochaine fois qu’on aurait l’occasion de cantiner, on pourrait dépenser la somme maximale, et non plus seulement 15$. En d’autres termes, les responsables déclarent qu’ils n’y a pas eu d’autres tests positifs au Covid-19. C’est intéressant, quand on pense au fait qu’aucun nouveau test n’a été effectué depuis la dernière tournée qui avait permis de déceler 800 cas positifs ! Nous présenterait-on des faits alternatifs sur le sujet qui nous intéresse ?

Dimanche 9 août 2020.

Me revoilà en train d’écouter les infos. Le monde continue de perdre la boule. Aujourd’hui, 2 autres sections ont eu un temps de promenade. Vendredi, les sections A et F ont eu leur temps de promenade. Aujourd’hui, les sections B et E y ont eu droit. On dirait qu’ils vont sauter un jour ou deux, puis laisser deux autres sections aller en promenade. En gros, on aura la possibilité d’aller en promenade une fois par semaine. Et je suis censé être heureux que ces salauds me laissent sortir de ma cage une fois par semaine ? Excusez-moi si je continue de râler ! Je connais le piège: ils vous retirent le peu de privilèges auxquels vous avez droit puis vous en restituent la moitié et vous êtes censé être reconnaissant ! Ce qu’ils doivent nous rendre, ce sont nos parloirs. Si on a zéro cas de Covid-19, alors, on devrait avoir des visites. Pourquoi est-ce que leurs “faits alternatifs” ne s’appliqueraient pas ici aussi en notre faveur ? Ha ha! C’est de la pure folie. Aujourd’hui, il fait plus frais ici et ça fait du bien. Mon allergie, mon rhume des foins m’embêtent beaucoup moins et c’est un énorme soulagement. J’arrive à penser un petit peu mieux et je tente d’écrire autant que je le peux. Je m’y adonne à corps perdu et me libère ainsi de mes chaînes, parce que je ne suis pas ici lorsque j’écris des lettres à des amis. Je suis bien loin de cet endroit et en ce moment, cela me convient parfaitement ! Je veux bien être n’importe où, pourvu que ce ne soit pas dans cet enfer, alors, j’ai hâte d’y retourner, et, ainsi, de quitter mentalement ma cellule !

 

Journal de bord du 22 au 27 juillet 2020

Le 22 juillet 2020

Petit-déjeuner : 235 ml de lait, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 85 g de flocons d’avoine, 6 pruneaux. Déjeuner : 1 haché de poulet, 1 biscuit, 6 mini carottes, 1 sandwich au beurre de cacahuète. Dîner: 1 mini hotdog sur un bâtonnet, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 4 pruneaux.

Me revoilà, le stylo à la main, à tenter de trouver du sens à ce tourbillon de folie qui menace d’avoir raison de nous tous. Je suis content d’avoir eu 9 heures de sommeil quasi-ininterrompu la nuit dernière. Du coup,  je sais que je pourrai abattre pas mal de boulot. Les raisons de se plaindre et d’être malheureux ne manquent pas, mais je fais du mieux que je peux pour ne pas perdre le dessus. N’oubliez pas, lorsque vous ne pouvez rien changer à une situation, faites comme si ça n’était pas grand chose, faites avec, n’allez pas contre. J’ai inscrit mon pote Jim Ulrich sur la liste de visiteurs et après 2 mois sans appels, je lui ai téléphoné lundi soir à 21 heures. Cela faisait un moment que je pensais à lui, et que j’étais sans nouvelles, alors je lui ai passé un coup de fil. J’avais 4 gardiens autour de moi qui écoutaient, mais on peut quand même appeler ça une conversation téléphonique, je crois. Mon ami avait besoin de ce coup de fil, et je suis heureux d’avoir pu lui faire ce plaisir. On a droit à 2 “essais”, si le numéro que l’on compose ne répond pas, ton premier essai est passé. Je n’ai pas intérêt à gaspiller mes chances, je n’ai pas droit à l’erreur avec mes appels. J’étais vraiment heureux d’avoir pu lui parler. Avec 800 cas positifs au Covid 19 à Polunsky, au bas mot, je ne m’attends pas à avoir de visites avant plusieurs années. Je crois que ces salauds vont garder l’habitude de nous maintenir à l’isolement total. Alors, je crois que je vais réfléchir à l’idée d’ajouter de nouveaux amis à ma liste de visiteurs que je pourrai appeler, à défaut de les voir au parloir. Peut-être que ces appels réguliers amèneront quelque chose de positif à ma vie. Y réfléchir ne suffira pas à concrétiser ce souhait. Mais je peux essayer. Au diable ceux qui disent que les jérémiades n’arrangent rien. Vous pensez que c’est révoltant qu’ils nous affament (un seul petit hot-dog sur un bâtonnet, franchement !), que les mois défilent sans communications ni visites ? Plaignez-vous! Envoyez un message à Sheree sur instagram à “FreeCharlesFlores” et demandez-lui comment faire et ce que l’on peut faire !

23 juillet

Petit-déjeuner : 235 ml de lait, 1 portion de bouillie, 1 sandwich au beurre de cacahuète. Déjeuner: 1 sandwich mortadelle/fromage, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 1 petite orange. Dîner : 1 haché de viande, sandwich au fromage, 1 sandwich au beurre de cacahuète.

24 juillet

Petit-déjeuner : 1 biscuit, 115 g de flocons d’avoine, 1 sandwich au beurre de cacahuète. Déjeuner : 1 sandwich au haché de poulet, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 6 pruneaux. Dîner: 170 g de bœuf haché, 2 tortillas de maïs, 1 sandwich au beurre de cacahuète.

Je recommence à vivre au jour le jour, maintenant plus que jamais. Aujourd’hui, c’était la douche. J’ai décidé d’accepter mon tour de douche, parce qu’ils les nettoient à l’eau de javel. J’espère que mon voisin n’a pas le Covid 19 et qu’il ne diffusera pas dans l’air le virus et que je ne l’attraperai pas quand il sortira de la douche et que j’y entrerai. Je fais bien attention de ne rien toucher et de ne pas mettre la main au visage pendant que je me lave.

On nous avait dit que l’on pourrait présenter notre liste de courses plafonnée à 15,00 $ et que l’on réceptionnerait nos commandes aujourd’hui. Mais on nous a ensuite annoncé que c’était annulé. Pourquoi? Ces bouffons ne font rien d’autre que de rester assis et de faire le tour de l’unité toutes les heures, pas plus. Pas de promenades. Les repas ? Ce sont des sacs en papier qui contiennent des sandwiches, il ne leur faut pas plus de 30 minutes pour distribuer ces cochonneries. On en est à 3 semaines de quarantaine médicale, on a droit à 15,00 $ d’achats alimentaires à la cantine. Ils nous affament, j’aurais bien besoin d’un sachet de nouilles instantanées de rabe là, maintenant. La rumeur dit que vendredi ou samedi dernier, la période de quarantaine a redémarré quand de nouveaux cas de Covid 19 ont été décelés suite aux tests. Comme si le mois de confinement qu’on venait de subir n’avait pas été une torture suffisante! Alors, je vous demande ceci. Appelez le 936-967-80-87 (00.1 avant depuis la France) pour joindre les Responsables, Messieurs  Dickens, Jackson, Perez, et demandez-leur pourquoi nous ne sommes pas autorisés à acheter de la nourriture. On nous affame, c’est quoi ce délire ? Quand est-ce que nous, les détenus du couloir et ceux à l’isolement par mesure de sécurité, pourrons appeler nos proches ? Les détenus de la Population Générale ont deux appels de 20 minutes GRATUITS chaque semaine. Ils ont droit aux promenades, à du temps en salle commune, toutes les deux heures, pourquoi est-ce que je ne suis pas sorti de ma cellule pour autre chose que la douche en un mois ?

26 juillet 2020
Petit-déjeuner : 235 ml de lait périmé, 85 g de flocons d’avoine, 2 œufs durs, 1 poignée de raisins secs. Déjeuner: 1 sandwich à la viande, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 1 poignée de raisins secs. Dîner: 170 g de hachis Parmentier, 1 biscuit, 1 sandwich au beurre de cacahuète.

Parfois, le week-end semble très long. Un ami ici me l’a fait remarquer et c’est vrai. Je crois que c’est l’isolement total que l’on subit sans date de levée de confinement en vue qui crée ce sentiment de « nuit » perpétuelle que l’on a à supporter. Avant, il y avait l’attente d’une visite, d’une rencontre avec mon équipe de défense, prévue des semaines, voire des mois à l’avance. Aujourd’hui, c’est le noir le plus total et ce n’est pas simple à vivre. Si bien que l’inconnu revêt une nouvelle forme, pire encore, qui nous terrorise. C’est là qu’il s’agit de mettre en place et de conserver une « vision en tunnel ». De rester en bonne santé et en forme autant que faire se peut en tentant de faire un peu d’exercice physique. Puis de se fixer un objectif quotidien et de s’y tenir. Une fois cet objectif atteint, on se sent bien. Et il s’agit de faire tout ce qu’on peut pour rester positif et faire le bien. D’aider les autres quand on le peut, de ne pas se laisser déborder par les pensées négatives, de ne pas céder au cynisme. De méditer, de prier et de faire en sorte d’être témoin de ce qui est juste et bon dans la vie. C’est ce à quoi j’aspire. C’est là que vient la foi, c’est là que le Bien absolu l’emporte sur le mal, dans notre vie comme dans le monde. L’espoir se fabrique chaque jour. Chaque jour, je sors de mon lit, je me recentre et je m’évertue à créer de l’espoir. Je me fixe des objectifs et me met en tête d’accorder toute mon attention à l’objectif immédiat pour aboutir à une satisfaction atteignable. Même si, pour le moment, on ne voit pas la lumière au bout du tunnel, on doit garder la foi et s’accrocher à la certitude que la lumière existe. Il ne faut surtout pas baisser la garde! Il faut continuer d’avancer, ne jamais abandonner !

Le 27 juillet

Petit-déjeuner: 235 ml de lait, 1 biscuit, 115 g de riz, 1 gâteau parfum café. Déjeuner: 2 biscuits, 1 haché au poulet, 1 sandwich au beurre de cacahuète. Dîner: 1 mini hot dog sur un bâtonnet, 1 sandwich au beurre de cacahuète, 1 poignée de raisins secs.

Aujourd’hui, c’est mon tour d’aller à la douche. Je suis allé me raser, mais j’ai réfléchi au risque d’exposition au Covid 19. J’ai remarqué que certains gars qui ne rataient jamais la douche ne quittaient plus leur cellule. Je comprends, mais je me demande où placer la limite par rapport au risque d’exposition? Cela fait une semaine que les allergies me gâchent la vie. C’est un calvaire et je ne suis pas le seul à être touché. Il n’y a pas longtemps, j’ai entendu parler de la poussière venue du Sahara en Afrique et je me demande si cette poussière n’est pas arrivée au Texas avec un effet retard, comme le Covid 19… Ce n’est pas facile d’écrire en ayant la sensation d’avoir la tête bourrée de coton, mais j’essaie. On nous a dit qu’on allait “peut-être” pouvoir aller cantiner le jeudi qui arrive, jusqu’à 15 $. On nous avait déjà dit ça la semaine dernière mais rien. J’espère que vous avez pris le téléphone pour demander des explications ! Je suis dans une cage, dans une des 500 cages alignées dans ce bâtiment et je ne croise personne que je pourrais interroger. Je ne vois personne plusieurs jours d’affilée. Je crois vraiment que la situation échappe à tout contrôle et qu’ils viennent seulement de commencer à tenter d’apporter une solution. Je me souviens quand mes potes se moquaient de moi quand je leur disais de faire des réserves de café, de nouilles déshydratées, de haricots et de riz, parce qu’on allait être confinés! Maintenant, plus personne ne rigole. Ainsi, le tour de montagnes russes à vous donner la nausée continue.

 

Journal de bord du 8 au 12 juillet 2020

Journal de bord du 8 au 12 juillet 2020

8 juillet 2020 (« We gotta get out of here », The Animals)

« Tout va s’arranger »

Comment ne pas être ravi de contempler,

Par-delà la lucarne, les nuages qui s’en vont,

Et une marée haute reflétée au plafond?

Il faudra bien mourir, je le sais, il le faudra bien,

Mais à quoi bon s’étendre?

Les rimes noircissent le papier sans effort,

Leur source secrète est le cœur en éveil ;

L’aurore vient en dépit de tout,

Et les villes lointaines sont belles et radieuses.

Couché dans une débauche de soleil,

Je regarde poindre le jour et fuir les nuages.

Tout va s’arranger

Derek Mahon

Aujourd’hui, Billy Wardlow fut mis à mort. On dit beaucoup de choses sur les détenus du couloir de la mort, mais laissez-moi vous dire ceci. Aucun de nous ne peut être réduit à ce qu’il a fait de pire. Que l’on soit innocent ou coupable, ce que l’on a fait de pire durant notre vie ne nous définit pas. C’est le cas pour vous?

Repose en paix Billy Joe Wardlow, puisse ta mort faire la différence. Tu étais la crème de la crème dans ce camp de la mort. Tu vas me manquer, mon pote.

10 juillet (« Heavy metal », Sammy Hagar)

« La profondeur de votre lutte déterminera la hauteur de votre succès » Inconnu

J’ai reçu l’appel téléphonique d’un de mes avocats aujourd’hui et pendant que j’étais au parloir, en attendant l’heure prévue, j’ai eu l’occasion de parler à quelqu’un là-bas. J’ai appris que les dernières volontés de Willy Wardlow étaient que Dani filme ce que ces salauds font du corps de la personne assassinée après avoir accompli leur sale besogne. Et j’étais d’accord à 100%.

Si je veux que tout le monde aux États-Unis et partout dans le monde VOIT cet acte sacrilège (ils vous assassinent puis vous mettent dans l’Église du Bon Dieu), c’est parce que les citoyens de ce pays et d’ailleurs ont besoin de savoir ce qui est fait en leur nom. Je ne veux plus jamais qu’un autre assassinat motivé par cette vengeance qu’autorise le droit s’apparente à un acte médical, propre, sans bavure. Ce qui est fait au nom de chaque citoyen de ce pays doit être connu de tous. Vous devez être témoin de l’action de votre gouvernement meurtrier à chaque exécution.

C’est pourquoi la dernière demande de Billy Wardlow était de faire enregistrer et de diffuser la vidéo de ce spectacle hérétique pour que le monde entier puisse y assister. Il s’est servi de ce meurtre pour faire éclater au grand jour ce qui nous arrive à nous, les prisonniers du couloir de la mort.

Les temps changent, que cela plaise ou non à ces salauds, et je fais partie de ce changement.

11 juillet 2020 (« I don’t know why », Angela Streeny)

« Nous sommes tous dans le caniveau, mais certains d’entre nous regardent les étoiles », Oscar Wilde

Parfois, ce bâtiment est si silencieux que j’entends les portes métalliques qui s’ouvrent et se ferment de l’autre côté de l’unité carcérale. Quand nous sommes en quarantaine, c’est aussi calme que ça et j’aime ça. C’est bien mieux qu’un brouhaha abrutissant.

Aujourd’hui, c’est un autre trio d’AC (agents correctionnels) qui a travaillé dans notre unité et un gars a été affecté au bâtiment 11, où les détenus issus de la population générale sont en confinement temporaire. Il a dit qu’il y avait 13 prisonniers avec le Covid-19 là-bas. Ils sont malades comme des chiens, ont de la fièvre, toussent, ont difficultés à respirer, tout ça… Plus de doutes, le virus est là. C’est un rappel à la réalité pour quelqu’un comme moi, assis dans cette cage, qui ne voit rien d’autre que ces murs pendant des mois, des années.

Puis hier, l’AC de la deuxième équipe de nuit a dit que de nouveaux cas positifs de Covid-19 avaient été découverts au sein de l’unité de la population générale. S’en sont suivis 14 autres jours de quarantaine. Chaque fois que nous avons un résultat de test positif, la quarantaine de 14 jours reprend.

Mais surtout, ce sont ces idiots qui ont introduit le Covid-19 et maintenant la situation empire. Jusqu’à présent, tout va bien dans ma cage. La semaine prochaine, nous serons autorisés cantiner, à acheter de quoi envoyer des courriers et nous laver. Je suis content, j’ai besoin de timbres.

Le mantra, c’est « Concentré, solide et en avant » quoiqu’il arrive. Il faut que je sorte de cet endroit.

12 juillet 2020 (« 3 lock-box », Sammy Hagar)

« Un gagnant est un rêveur qui n’abandonne jamais » – Nelson Mandela

Dimanche soir. Une énième semaine se termine. Je pense à la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant dans l’unité Polunsky. C’est une très grande prison, plus de 2200 personnes y sont enfermées. L’écrasante majorité est composée de détenus issus de la population générale (« de droit commun »). Dans le couloir de la mort, 190 détenus survivent au sein du bâtiment 12. Au cours des deux ou trois dernières semaines, nous avons eu à plusieurs reprises des cas positifs au Covid-19 parmi les gardiens qui vont et viennent quotidiennement. Il y a deux semaines, il n’y avait pas assez d’AC pour plus de deux jours avec « promenade » dans le couloir. Lundi dernier, on nous a dit qu’il manquait tellement de personnel que toute l’unité a été mise en quarantaine médicale pendant 14 jours.

Ensuite, nous avons appris que les gardiens qui travaillent dans la cuisine de l’unité de la population générale étaient tous en quarantaine. Tous testés positifs au Covid-19. Et ils ont transmis la maladie aux détenus qui travaillent dans les cuisines. Et maintenant, ces détenus sont malades, très malades. Il y a de plus en plus de détenus de la population générale qui tombent malades, c’est très grave. Ces gars-là vivent les uns sur les autres et sont en quarantaine, mais pour eux, toute distanciation physique est impossible. Il n’y a rien à faire. Et ce sont les détenus qui reviennent et qui font du travail d’esclave au Département de la Justice Pénale du Texas (TDCJ) : du nettoyage et du travail manuel, pendant qu’un AC les « surveille ». Maintenant, on se retrouve avec deux sources potentielles d’infection au covid-19. Les AC qui vont et qui viennent, et les détenus de la population générale qui tombent malade à cause de leurs gardiens car ils travaillent avec des AC. Je ne sais pas ce qui va se passer, mais l’objectif est de rester en sécurité et en bonne santé !

Journal de bord du 25 juin au 5 juillet 2020

Jeudi 25 juin 2020 (« So into you », Fabulous) « Si vous pensez pouvoir gagner, vous pouvez gagner. Pour vaincre, il faut avoir la foi. » William Hazlitt

J’ai reçu l’appel d’un avocat ce matin.

J’imagine que je devrais me sentir soulagé et être content. Et je pense que c’est le cas quand je songe au soulagement de ma famille et de mes amis. En ce qui me concerne ? Pas tant que ça. Je ne crois pas pouvoir passer outre le fait que moi, l’homme à la peau mat qui clame son innocence depuis le départ, je doive faire face à ça. Et que le meurtrier blanc qui a avoué avoir commis le crime pour lequel je suis là, dans le couloir de la mort, est en liberté conditionnelle.

Être victime, depuis plus de 22 ans, d’un système de justice pénale qui intègre en tout état de cause un racisme institutionnel m’affecte de multiples façons qu’il m’est difficile de verbaliser. Et tous ces traumatismes m’ont façonné de telle manière qu’un retour en arrière est impossible.

C’est la réalité de cette situation, c’est comme ça.

S’il y a une chose dont je suis certain, c’est que je ne me contenterai pas d’être libéré de cette pression. Je ne serai pas entièrement satisfait tant que je ne serai pas libre et loin d’ici.

Vendredi 26 juin 2020 (« You’re no good », Linda Rondstadt).

« Comptez votre âge en amis, pas en années. Comptez votre vie en sourires, pas en larmes. » John Lennon

Durant ces dernières semaines, je me suis efforcé de développer une sorte de vision télescopique : je garde les yeux rivés sur mon objectif et ne laisse rien ni personne m’en faire dévier.

Aujourd’hui, je me suis levé à cinq heures et demie pour mon tour de promenade. À 6 heures, on m’avait placé dans la salle commune ; ça ne faisait même pas 15 minutes que j’y étais qu’un gardien a reçu un appel lui disant « Pas de promenade ! Seulement les douches ». Pendant tout ce temps, je me disais que j’aurais pu être en train de dormir. Donc, je prends ma douche et retourne au lit aussitôt. C’était calme, je me suis vite rendormi. J’ai dormi pendant quelques heures, et assez étrangement, je me suis dit « Un avocat va te téléphoner ! » QUATRE fois je crois. Et ça n’a pas raté, vers midi et demi, les gardiens sont devant ma porte : « Appel de l’avocat ! » Je n’attends plus qu’une chose, c’est le fameux « message », le « Réveillez-vous, vous rentrez chez vous ! » Haha !

Quoi qu’il en soit, c’était bel et bien la personne à laquelle je pensais, et il semblerait que dans un avenir proche, après avoir traversé la tempête, l’on se trouve maintenant en eaux calmes, je suis content. Pour l’heure, je retourne à mon boulot et à ma vision linéaire. J’ai pas mal de choses à faire, et c’est plutôt une bonne chose. J’ai démarré la journée deux fois, et là, je suis au boulot. Je fais ce dont j’ai besoin et pas ce que j’ai envie de faire. Ça fait du bien, et je me sens un peu en veine.

Samedi 27 juin 2020 (« Damn’ Good », David Lee Roth)

« La seule chose qui soit pire que de ne pas être libre, c’est de ne pas se souvenir de quand on était libre. C’est peut-être la chose la plus triste qui soit ». Leonard Peltier

J’adore autant que je déteste les souvenirs que j’ai de l’époque où j’étais libre. Je les déteste tellement que je n’y ai volontairement pas pensé durant des années. Je les aime tellement que lorsque je les sors de ma boîte à souvenirs, je les y remets s’ils sont douloureux. Ils me donnent envie de pleurer. Donc j’évite d’y penser, c’est ma façon de les gérer.

Aujourd’hui, quelque chose m’a poussé à écrire un essai qui parle des souvenirs que je garde de l’époque où j’étais libre. J’y évoque mon ami Justin Cody Prather. C’était un type bien, toujours prêt à tout, et il ne caftait jamais. Il l’avait appris de moi, pour le meilleur et pour le pire. Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent de Cody, il était prêt à tout et ce n’était pas une balance ! On a été meilleurs amis jusqu’à ce que la prison nous éloigne. Lui en premier, puis moi, et me voilà ici. Je me souviens que Cody m’avait parlé de son père ; il se déplaçait en Harley Davidson et était originaire de la Virginie Occidentale, je crois… Ça fait plus de 30 ans. Son père est mort jeune, dans la quarantaine, il est décédé quand on est devenu amis.

En 2016 j’ai appris que mon ami Cody était mort dans son sommeil. Il est parti trop tôt comme son père. Je me souviens que quand le titre « Damn’ Good » est sorti, Cody et moi on s’éclatait dessus dans la El Camino. J’ai adoré cette chanson dès la première fois que je l’ai écoutée. Qui aurait cru que Cody et moi, on vivait alors ces « Damn Good Times » (cette sacrée bonne époque)…

Dimanche 28 juin 2020 (« Long long time », Linda Ronstadt)

« Ce n’est pas là où je respire que je vis, mais là où j’aime. » St Robert Southwell

C’est un nouveau dimanche matin. J’écoute « Blues Brunch with Nuri Nuri », et franchement, ce gars-là en connaît un rayon en matière de blues. J’ai dormi toute la nuit, et là, musique à fond, je donne tout. Je suis au sol et j’enchaîne une demi-heure de sport non-stop. Et un peu de méditation avec ça avant mon tour d’aller à la douche. Quelqu’un que je connais m’a dit d’arrêter de mordre, j’ai répondu : « Okay ». Pour éviter de laisser mes « pulsions guerrières » mettre à mal d’autres relations, je n’ai pas d’autre choix que de me défouler, pour évacuer toute cette rage. J’arrive à faire baisser la pression à moitié, là, je parviens à maîtriser mes émotions négatives. Mais, ce n’est franchement pas facile, ça non. Mais je gère. Et vous le savez déjà, j’ai la carrure pour encaisser tout ça.

Cette espèce de nuage noir qui m’a suivi pendant environ un an a enfin disparu. Et ça fait un bien fou. Je me demandais combien de temps ça allait durer… Là, je suis content d’être de nouveau moi-même à 100%. Je suis tout à fait capable de transformer mes rêves en réalité quand j’ai toute ma force. Vous ne me croyez pas ? Regardez bien.

C’est assez dingue ici : pas de promenade à cause du sous-effectif, ensuite, ces deux derniers jours, de nombreuses rumeurs de cas de COVID-19 dans l’unité, dont certaines avérées, ont couru… Plus d’appels téléphonique depuis que le décret d’urgence du Département de la Justice Pénale du Texas (TDCJ) est arrivé à son terme. Donc pas de parloir, pas d’appels, pas de visites/rendez-vous avec mon équipe juridique, et je suis censé ne rien dire. On dirait que je vais avoir besoin de faire plus de sport, mes pulsions refont surface !

 

Jeudi 2 juillet 2020 (« Little by Little », Robert Plant)

« Si vous y croyez, vous êtes déjà à moitié arrivé. » Teddy Roosevelt

Une fois, on m’a dit que si j’étais autant organisé et que le fait d’avoir mes affaires bien à leur place m’obsédait, c’est parce que je maîtrisais si peu le cours de ma vie. De ce fait, je fais mon maximum par rapport à ce que je peux contrôler ici. Je prévois la veille les activités du lendemain. Quand je veux sortir le matin, je me couche à 23 heures pour pouvoir me réveiller à 5 heures et me sentir reposé. Tous les jours, 5 jours par semaine, je vais en promenade vers 6 heures du matin, ou alors je fais partie du groupe du premier tour de promenade que les gardiens répartissent dans les 6 salles communes et les 4 cours extérieures. Les gardiens commencent leur service à cinq heures et demie du matin, ils viennent nous demander si on veut sortir. On est dans la salle commune dès 6 heures. J’aime sortir tôt le matin. Quand je prévois bien les choses, je peux sortir, me doucher et avoir l’équivalent d’une journée d’écriture ou de travail à faire.

Hier soir, j’étais au lit à 23 heures, et je me suis levé à 5 heures. Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, tout ça tout ça… La gardienne est venue me demander si j’allais me doucher. Je lui ai répondu que oui, mais après être sorti ! Elle m’a ensuite dit que personne ne sortirait car il n’y avait pas assez de gardiens. On n’aurait que la douche. Pour moi, les gardiens de prison, c’est comme les couvreurs ! Ils n’aiment pas travailler, et le jour de leur paie, ils vont tout claquer au bar du coin ou en boite de nuit, et ne viennent pas travailler le lendemain. Ils sont encore bourrés le lendemain ! Et devinez quel jour c’était hier pour ces salauds ? Le jour de paie ! Donc j’ai fait du sport dans ma cellule, et je suis là, assis, à vouloir en sortir.

Vendredi 3 juillet 2020 (« Mercury », The Steve Miller Band)

« De l’amour et de la confiance, entre ce qui est dit et ce que l’on entend durant notre vie, ça peut faire toute la différence. » Fred Rogers

Aujourd’hui, j’ai fait quelque chose que j’adore. C’est à dire que j’ai pris une journée pour lire tous les magazines et les journaux pas encore ouverts que je reçois ici. Souvent, pendant la semaine et surtout les lundis, mardis et mercredis, je me concentre sur ma correspondance et j’écris beaucoup de courriers. C’est un weekend férié qui marque le 4 juillet, jour de notre fête nationale ou « Independence Day ». Je suis sûr qu’il n’y aura pas de courrier aujourd’hui, il ne manquait plus que ça ! On n’aura certainement pas de courrier lundi. On verra.

Sans grande surprise, les couvreurs, pardon, les gardiens, ne sont pas venus. Pas de promenade pour nous. Toujours pas ! Je suis en colère, mais on ne peut rien y faire. J’ai dit ça à un ami aujourd’hui : « La seule chose qui va se passer, c’est que l’on va avoir des problèmes et que l’on va se retrouver au Niveau 3 ». Donc, je préfère évacuer ma frustration en faisant du sport dans ma cellule. Jusque-là, tout va bien ! Quand, dans la vie, il y a des choses que l’on ne peut pas contrôler, on doit l’accepter et faire avec. On a beau leur montrer à quel point on souffre, tout ce que ça va nous apporter, c’est de nous retrouver dans une cellule sans mobilier après nous être fait gazer. Je passe mon tour !

Je préfère profiter de la journée. Pendant tout le weekend, ils ont passé des standards et des tubes plus récents sur la station de radio The Box, un peu comme une compétition. Je me suis éclaté ! Je vous préviens, mon truc, c’est les classiques de la chanson américaine !

Samedi 4 juillet 2020 (« If trouble was money », Albert Collins)

« Pas besoin de faire de longs discours pour dire la vérité. » Chief Joseph

Aujourd’hui, c’est « Independence Day », notre fête nationale, et dans le couloir de la mort, on célèbre ce jour en étant privé de promenade, pour ne pas changer… Je suis content de pouvoir me doucher. Faut bien être content de quelque chose. À midi on nous a donné du poulet cuit à la broche. J’ai fait des tacos avec ma cuisse de poulet, le riz et les haricots. C’est comme ça qu’un Latino fête le 4 juillet !

Là, quelque part, certains de mes proches sont dans un jardin ; ils écoutent de la musique et sirotent des bières pendant que le barbecue chauffe. Le 4 juillet a toujours été un jour chômé, et c’est comme ça qu’ils le passent. De la musique Tex-Mex, des enfants qui courent après les chiens dans le jardin. Des amis et de la famille qui vont et viennent, la bière qui coule à flots. La Budweiser, la Bud Lite ou encore la Miller Lite en tête de liste, fraîchement sorties de la glacière. Des hot-dogs, des hamburgers, du poulet, ou encore des côtelettes cuisent sur le grill…

Je ne sais pas pourquoi j’ai repensé à ma vie d’avant le couloir de la mort, c’est venu comme ça ! Je remarque que ce n’est pas aussi douloureux qu’avant. Je ne saurais pas vraiment dire pourquoi, mais ces souvenirs se font très présents, surtout à Noël ou le 4 juillet. Je continue de faire ce que je peux pour tenter de retrouver le monde libre que j’ai quitté il y a si longtemps. Peut-être suis-je sur le long chemin du retour – tant que je suis sur en chemin !

Dimanche 5 juillet 2020 (« Blues Power-Live », Albert King)

« Plus j’avance en âge et plus la vie est belle. » Frank Lloyd Wright

Tous les dimanches, j’écoute « Blues Brunch with Nuri Nuri », sur kpft.org, c’est un rendez-vous incontournable ! Et comme d’habitude, ce type est génial, toujours à partager tous ces morceaux de blues extraordinaires. J’ai dormi tard, jusque 9 heures, après avoir réalisé que je ne suis pas au mieux de ma forme si je ne dors pas assez. Si je dors 8 heures, je suis en pleine forme, comme aujourd’hui. Il m’aura juste fallu 50 ans pour m’en rendre compte ! J’ai fait mon sport et ma méditation, et me voilà avec un stylo à la main. J’en suis venu à vraiment aimer le blues. J’avais un ami qui s’appelait Bill Dillworth, il était mécano. Il avait un atelier à côté de l’entreprise de couverture et de bâtiment de mon père, il y a bien, bien longtemps. Bill ne jurait que par Mopar: il possédait quelques jolis modèles de Chrysler et de Dodges. On est devenus amis. J’avais 20 ans et quelques et lui était dans la quarantaine, il adorait le blues. Moi, je n’y connaissais rien, puis une fois il nous a invités, ma copine et moi, à aller dans un club de blues. On l’y a suivi. Je me souviens juste que c’était dans la partie est de Dallas, et que c’était Bill qui avait conduit. On est arrivé en début de soirée, on a pris des verres et la musique a commencé. C’était incroyable. L’une de mes meilleures expériences musicales en live de ma vie.

C’est seulement maintenant que je comprends à quel point le blues est fantastique, et j’en profite tous les weekends. Dès que je sors de ce trou, je vais faire en sorte d’assister à plein d’autres concerts de blues !

SOUVENIRS DEPUIS LE COULOIR DE LA MORT – Samedi 27 Juin 2020

SOUVENIRS DEPUIS LE COULOIR DE LA MORT – Samedi 27 Juin 2020

« Pour vraiment prendre conscience de ce qu’est « le bon vieux temps », il faut en avoir fait l’expérience, ne serait-ce que le temps d’une après-midi ». Will Brantley

Ce matin, j’ai commencé ma journée comme d’habitude dans cette cage de 5,5 mètres carrés dans laquelle je vis depuis 22 années, à l’isolement, dans le couloir de la mort du Texas. J’ai réussi à dormir presque huit heures, sans être réveillé 4 ou 5 fois. Je crois que je ne me suis réveillé qu’une ou deux fois, donc je me sens bien. Ma routine consiste à me lever, me laver, boire un café, nettoyer ma cellule, faire un peu de sport et de pratique spirituelle, puis la journée démarre. Pendant que je buvais mon café, j’ai ouvert un magazine qui était arrivé la veille avec le courrier. Il s’agit de « D magazine ». C’est une publication qui parle de Dallas, au Texas – c’est chez moi.

Alors que je continuais de boire mon café et que je feuilletais ce magazine, je suis tombé sur un article intitulé « Souvenirs autour du grill ». L’article parlait de quatre personnes et de leurs souvenirs liés aux grillades faites au charbon de bois. Au Texas on appelle ça un « Barbecue », ou « bbq ».

En tout bon Texan que je suis, j’associe le « bbq » à quantité de souvenirs et à un paquet de bons moments. C’était « bbq », bière, et musique. Au fur et à mesure que je lis cet article, une énorme vague de souvenirs qui datent du bon vieux temps, quand j’étais jeune et que je pensais vivre éternellement, m’envahit. A l’époque, vivre consistait à travailler toute la semaine et attendre le weekend pour se retrouver entre amis et s’amuser. Je n’avais alors pas cette épée de Damoclès au-dessus de la tête.

Quand j’avais 16 ans, ma famille et moi, on a déménagé. On a quitté l’ouest du Texas pour rejoindre la région de Dallas, dans une banlieue qui s’appelle Irving. Déménager a été difficile, et j’ai eu du mal à m’adapter. Durant mes deux premières années à Irving, je ne me suis pas vraiment fait d’amis. Au lieu de ça, je trainais avec mes frères aînés, tous des junkies, ce qui était bien la dernière chose dont j’avais besoin car tout ce que j’ai appris, c’est à consommer des drogues comme eux !

Quoi qu’il en soit, c’est à l’âge de 18 ans que j’ai rencontré mon premier véritable ami à Irving. Il vivait en face de la nouvelle maison dans laquelle nous avions emménagé. Il s’appelait Cody. C’était un accro au skate et un fumeur de joints, autrement dit, il avait les cheveux longs et aimait faire la fête et rouler en skateboard. Il avait 16 ans quand on s’est rencontré. On est très vite devenus inséparables. Il était cool, on s’entendait bien.

J’étais celui qui venait d’arriver en ville, or, Cody avait grandi à Irving. Il connaissait tout le monde, et on avait toujours quelque chose à faire, une soirée où s’incruster, un concert à ne pas louper, une fête foraine où s’amuser, et j’en passe ! Et c’est moi qui avais la caisse.

Quand j’ai eu 18 ans, mon père m’avait acheté une El Camino de 1972 au moteur surgonflé. Il n’était pas au courant que le moteur avait été quelque peu trafiqué et il n’avait aucune idée de ce qu’il m’avait mis entre les mains, mais moi, je le savais, c’était notre caisse. En plus, les El Camino sont construites par Chevrolet, elles sont moitié Chevelle, moitié pick-up ! Elle avait une plateforme à l’arrière, en un mot, elle était cool ! Sans parler du fait qu’elle avait un moteur V8 surpuissant de près de 6 litres qui était plus ou moins indestructible. Et quand effectivement on le cassait, on savait le réparer.

Notre truc à nous, c’était de nous balader en voiture dans Irving le vendredi soir. Il y avait une rue en particulier où tous les jeunes allaient circuler au pas en faisant de grands cercles, histoire de mater les filles (ou les gars !), de discuter entre potes et de s’amuser. À minuit on allait rejoindre l’autoroute et on descendait jusqu’au Loop 12 et Northwest Highway – c’était l’un des endroits où les jeunes faisaient des courses de rue. Cody et moi, on était connu grâce à la El Camino ; elle était rapide, j’étais un dur, lui connaissait tout le monde et personne ne pouvait nous dire quoi que ce soit ! On pensait qu’on allait vivre éternellement, quoi.

Au début des années 90, les courses de rue c’était l’occasion pour des centaines, et parfois pour plus d’un millier de personnes, de se rassembler et de venir faire de grandes fêtes autour des courses de voitures en ligne droite. C’était comme dans les films, c’était un rêve de gamin !

Cody et moi, on restait dehors jusque 4 ou 5 heures du matin, au moment où les gens commençaient à partir après avoir fait la fête toute la nuit. On remontait un peu à regret dans la El Camino avant de rejoindre l’autoroute et de retourner à Irving, et je ne sais trop comment, on arrivait à rentrer chez nous en un seul morceau. On faisait ça tous les week-ends, le vendredi soir et le samedi soir ; si vous vouliez savoir où on était, c’était aux courses de rue. Avec tous les potes.

Alors, je ne dis pas que c’était bien, je ne cherche pas à enjoliver le passé, je dis simplement que c’était ce que l’on faisait à l’époque.

Le dimanche matin arrivait, on se levait vers 11 heures. Lui était chez lui et moi chez moi, avec mes parents. On savait déjà ce qu’on allait faire le dimanche. On faisait monter mes Pitbull terriers américains dans la El Camino, on prenait la glacière et on allait au Lac Grapevine pour faire un barbecue ! Il fallait aller chercher une conserve de maïs, une boîte de haricots « Ranch Style » et 4 ou 5 grosses pommes de terre dans le garde-manger de maman.

Quand je sortais de la maison, je trouvais Cody la plupart du temps en train de fumer une cigarette, assis sous son porche, puis il rejoignait l’allée, il savait quoi faire : prendre la grande glacière, sortir du garage la caisse à bouteilles de lait en plastique qui contenait tout le nécessaire pour le barbecue et balancer le tout à l’arrière de la voiture, avant d’aller chercher les chiens.

Quand on a quitté Midland pour Irving, on a pris Kelly avec nous. C’était un pitbull au poil blond et à la truffe rouge. C’était une chienne de grande taille pour sa race, elle dépassait un peu mon genou et pesait un peu moins de 30 kg ; c’était que du muscle. On a fait s’accoupler Kelly avec le pitbull d’un ami et j’ai fini par garder l’un des chiots que j’ai appelé Spike.

Kelly était un bon chien, mais Spike était unique. Il avait le poil de la couleur du daim, et avait comme des chaussettes noires aux pattes. Il avait la truffe violet foncé. Il pesait un peu plus de 20 kg, que du muscle, lui aussi. Il était très beau et aurait pu être un modèle pour la race. Et c’est qu’il était futé ! Ces deux chiens avaient été dressés, Cody et moi, on travaillait toujours avec eux.

Ils allaient dans le jardin, derrière notre maison, et c’était comme s’ils savaient quel jour on était, ils étaient prêts à partir. J’ouvrais la porte et leur disait : « Allez ! Dans le pick-up ! ». C’est alors qu’ils s’élançaient puis sautaient au fond de la plateforme du pick-up, prêts à partir. Les chiens adorent rouler dans une voiture ou un pick-up, ils ne vivent que pour ça ! J’attrapais leurs colliers avec des pics et leurs laisses en cuir, on était prêt à décoller.

On démarrait la El Camino et on se mettait en route. Pour cette sortie, on devait s’arrêter au supermarché avant de quitter Irving. On s’arrêtait à la superette la plus proche, Cody restait dans le pick-up avec les chiens et moi, j’entrais dans le magasin et allais directement au rayon boucherie. En général, j’achetais un gros morceau de poitrine de bœuf, mais parfois je choisissais des côtes de porc ou des cuisses de poulet. Je prenais des tomates fraîches, des poivrons, des oignons, un sac de charbon de bois, et on était repartis.

Le prochain arrêt, c’était la Northwest Highway, c’est à dire la piste de course. Là, on faisait le plein de la El Camino et on achetait de la bière. En général, on prenait un pack de Budweiser et deux sachets de glace que l’on vidait dans la glacière avec la viande et les autres aliments.

Puis on reprenait la voie rapide et on partait vers Grapevine, au Texas. C’est là qu’est le lac Grapevine. La El Camino avait un autoradio, c’était 30 ans en arrière, donc là, c’était des cassettes quoi. Cody en avait toujours 2 ou 3 dans sa poche, des cassettes de Heavy Metal. Metallica, Slayer, Anthrax. On mettait la musique à fond et on roulait à toute berzingue, pressé qu’on était d’arriver au lac.

Le trajet durait peut-être une demi-heure, et une fois arrivé au lac, il y avait un endroit en particulier où on allait, où tous les motards se réunissaient. Quand il faisait beau, on pouvait voir 50, voire 75 Harley Davidson, toutes chromées, garées en file dans la partie en bordure du lac aménagée en parc géré par l’État. On se dépêchait car on voulait absolument l’une de ces tables couvertes dotée d’une grille de barbecue insérée directement dans la dalle de ciment. C’était peine perdue si on arrivait après midi ! Toutes les tables et leurs grilles étaient prises. Mais on s’est jamais retrouvé le bec dans l’eau. On garait le pick-up dans la petite zone et on déchargeait tout le matos et la barbaque. On sortait les chiens, mais on les tenait avec nos laisses de deux mètres parce qu’il y avait d’autres chiens et d’autres personnes qui couraient, on ne voulait pas d’embrouilles avec quelqu’un si l’un de leurs chiens se faisait mordre par les nôtres.

Cody, c’était toujours le DJ. Il ouvrait les portières de la El Camino et mettait le son à fond, il adorait la chanson « Ride the Lightning » de Metallica, et depuis ce jour, chaque fois que j’entends une musique de cet album, je repense à ces moments-là et à mon vieil ami. On en était alors à 3 bières et comme d’habitude, il roulait un joint, on le fumait, puis je jetais le charbon de bois sur le grill, avant de l’arroser avec le liquide combustible qui faisait partie du matériel que l’on prenait pour nos sorties barbecue au lac. Après avoir laissé le charbon de bois s’imbiber du liquide 10 minutes, je l’allumais. Ce feu, il était grand et vif, et les flammes nettoyaient le grill. Pendant que le charbon brûlait, je préparais la nourriture, c’était moi le cuistot. J’ai toujours été un cuistot ! Haha ! En général, ça se passait comme ça : je prenais le papier aluminium et j’étalais deux morceaux d’environ 50 cm de côté avant d’ouvrir la poitrine et de la déposer sur le papier. Je l’assaisonnais avec du sel, coupais le poivron vert en morceaux, puis les oignons et les tomates en tranches avant d’en recouvrir le grand morceau de viande. Je refermais la poitrine, vérifiais quel l’alu soit bien étanche et c’était parti pour la cuisson. Je prenais les pommes de terre et les enroulais dans du papier aluminium avant de les jeter dans le charbon de bois, c’était comme des pommes de terre cuites au four ! Puis je mettais la poitrine emballée dans le papier aluminium sur le grill et la laissait cuire.

Pendant que la nourriture cuisait toute seule, nous, on buvait quelque chose comme 6 bières chacun, on fumait parfois quelques joints de plus et on restait assis sur le hayon de la El Camino, à regarder les gens passer. On en voyait de tous les genres : des couples âgés qui avaient certainement été des hippies quand c’était dans l’air du temps, des motards et un paquet de nanas ! Haha ! On avait évidemment nos chiens avec nous, et c’est alors que Spike entrait en action. C’était un chien magnifique, et je n’ai toujours pas vu de fille passer devant sans s’arrêter pour le caresser et faire connaissance avec lui : le moyen parfait d’engager la conversation ! Haha ! Évidemment, les amis que l’on voyait aux courses de rue se pointaient, et on se retrouvait avec toute une bande de potes là-bas aussi. Parfois mes frères se radinaient, sinon il y avait des semaines où on allait tous ensemble au lac. C’était la belle époque. On avait de la bonne musique, de la bière fraîche et de chouettes amis avec qui discuter, c’était génial. Après 4 ou 5 heures, les grillades étaient parfaites. Et après avoir bu 6 ou 8 bières fraîches, on avait faim ! Haha !

On prenait les conserves de haricots et de maïs, on marquait un creux sur le côté des boites et on les plaçait sur le feu pendant environ 30 minutes avant de passer à table. On accompagnait le tout d’un grand morceau de pain à l’ail enroulé dans du papier aluminium que j’avais aussi acheté au supermarché. Le temps que les haricots et le maïs aient fini de chauffer et que le creux sur le côté de la boîte ait fait « pop », le pain était chaud et prêt à être mangé. On retirait le tout du grill et on entamait le repas. La poitrine de bœuf était parfaite : tendre, moelleuse, accompagnée des légumes qui avaient cuit sur le dessus. Les pommes de terre aussi : la peau était croustillante et l’intérieur chaud et moelleux, ça faisait fondre le beurre. Et le pain, c’était la touche finale ! C’était parfait, rien à redire. On mangeait jusqu’à plus faim, tout comme les chiens. Pour moi, c’était ça le bon vieux temps… Tout m’était instantanément revenu à l’esprit en lisant l’article dans le magazine. Pour moi, c’était le paradis !

Charles D. FLORES #999299

Unité Polunsky, Couloir de la mort, Texas

Samedi 27 juin 2020

NOUVELLES DU COULOIR DE LA MORT – LUNDI 1ER JUIN 2020

NOUVELLES DU COULOIR DE LA MORT – LUNDI 1ER JUIN 2020

« Les paroles venues du cœur sont un rayon de miel, Douces pour l’âme et salutaires pour le corps. »

– Proverbes 16:24

Il n’y a pas longtemps, j’ai lu un article à propos d’un orque qui s’appelle Talequah et qui a accouché l’été dernier. Le groupe d’orques de Talequah était en danger et leur seul espoir de survie était ce nouveau-né. Mais le veau a vécu moins d’une heure. Dans une démonstration de deuil à laquelle ont assisté les gens du monde entier, Talequah a poussé son veau mort dans les eaux froides de l’océan Pacifique pendant dix-sept jours avant de le laisser partir.

Quand j’ai lu l’article à propos de Talequah et de cette terrible perte, j’ai été profondément ému car je comprenais au plus profond de moi ce que c’était de subir ce genre de perte qui vous brise le cœur et de ne pas pouvoir lâcher prise. Quand j’ai perdu ma mère l’an dernier, sa perte m’a fait réaliser qu’avec elle, c’était aussi mon père, mon foyer et le rêve de retourner dans le passé pour consacrer ma vie à m’occuper d’eux qui étaient partis. Comme le veau de Talequah, j’avais tout perdu, et rien ne serait plus comme avant. Quand on se retrouve dans ce genre de situation, impossible de lâcher prise. Impossible d’arrêter de penser à ce que l’on a perdu. Car tout ce que moi et ma chère famille avons partagé a disparu à jamais.

Quand je repense à ces jours, ces semaines et ces mois de chagrin dans ma vie, je sais ce qui m’a permis de les surmonter. C’était ce qu’avaient fait celles et ceux qui m’ont aimé et se sont souciés de mon bien-être. Toutes celles et ceux qui ont accouru, et qui m’ont aidé à me relever et m’ont dit des mots remplis d’amour, de bonté, et qui m’ont encore montré que nous étions amis. De vrais amis qui ont pleuré avec moi, qui m’ont tenu la main et ont laissé leur cœur se briser avec le mien. Car lorsqu’on est confronté à de telles pertes, rien ne peut « améliorer la situation ». Et ces amis des beaux jours, les anciens comme les nouveaux, ils ont fui cette situation pour se distraire avec tout ce que leur privilège leur permettait. Parce qu’être humain, c’est pénible, et c’est extrêmement difficile.

« La véritable grandeur d’un homme ne se mesure pas à des moments où il est à son aise, mais lorsqu’il traverse une période de controverses et de défis », Martin Luther King Jr.

J’ai compris que de part le chagrin et la souffrance que nous traversons lors de cette expérience que nous appelons la vie, il est dans la nature humaine de se lamenter et d’être amené à exprimer notre douleur et notre chagrin. C’est le prix à payer pour aimer quelqu’un à tel point que l’on aurait l’impression de mourir si nous venions à le perdre. Je me suis souvent demandé pourquoi je traversais ces longues périodes de souffrance extrême, mais je n’ai pas trouvé de réponse. Ça faisait partie de la vie, c’était quelque chose dont nous ferions l’expérience tôt ou tard.

Puis, mon appel concernant l’hypnose a été rejeté par la cour d’appel pénale du Texas (CCA). Lorsque j’ai appris que nous avions perdu et que nous devions passer au plan B, il m’a fallu environ 5 minutes pour me remettre de cette perte et ACCEPTER le fait que, pour une raison quelconque, il n’était tout simplement pas l’heure pour moi d’être libre. Nous sommes loin d’avoir épuisé tous les recours ; d’autres appels  nous mettront encore à l’épreuve. En termes de temps réel, ça veut dire que je serai ici pendant encore quatre ou cinq ans, et ça, je l’ai accepté.

En arrivant à ce niveau d’acceptation dans ma vie, j’ai réalisé pourquoi j’avais dû endurer une douleur aussi terrible, voir mon cœur se briser et souffrir aussi longtemps : la disparition de mes parents, la perte de notre foyer et de notre rêve, l’abandon de l’une de mes meilleures amies… tout ça…. J’ai su en un instant que si j’avais à traverser tout ça, c’était pour mieux me relever et continuer d’avancer après avoir subi cette perte. Car c’est l’une de mes plus grosses pertes. Et laissez-moi vous dire quelque chose, c’était un sacré coup que j’ai pris, mais j’ai acquis une telle force que même la perte de l’appel pour l’hypnose ne m’a pas fait perdre le fil. Maintenant, je suis à 100%, je n’ai rien perdu de ma motivation. Et si j’ai pu encaisser un tel coup et continuer à avancer, c’est grâce aux énormes pertes que j’ai subies ces deux dernières années.

À ce combat qu’est la vie ! Et la paix et la justice pour tous !

Charles D. Flores No. 99299

Couloir de la mort

Lundi 1er juin 2020

Journal de bord. Le 8 juin 2020, à 15 heures

8 juin 2020, 15 heures

Alors, vous êtes-vous déjà levé en vous disant qu’une bonne journée bien remplie vous attendait ? Et vous êtes-vous déjà rendu compte, au beau milieu de la journée, qu’en fait, tout partait en sucette, sans avoir la moindre idée du moment où tout ce chaos prendrait fin ?

Nous étions confinés dans nos cellules depuis le 6 juin 2020, lorsque des membres du personnel pénitentiaire sont venus prélever des échantillons buccaux pour effectuer des tests du Covid-19. Hier matin, ils sont arrivés dans mon unité et ont effectué ces tests. Ce n’était pas grand chose. C’était pour moi une journée comme une autre, j’écoutais de la musique, j’écrivais des courriers, lorsque les gardiens ont entamé la tournée des douches. Mon voisin y va presque à chaque fois, mais pas ce jour-là, alors, j’attrape mes affaires et j’y vais.

Les gardiens me laissent prendre ma douche et à leur retour, ils essaient d’ouvrir ma porte… Pas moyen ! Oooooh, non ! Pour ouvrir les cellules, le gardien de service appuie sur un bouton, ce qui permet de déverrouiller la porte, que le gardien ouvre en la laissant glisser latéralement.

On me fait sortir de la douche puis on m’installe dans la salle de promenade. Le responsable arrive, on ouvre la porte manuellement puis je rejoins ma cellule. Le problème, c’est sans doute que le bouton qui actionne la porte n’a pas été changé depuis 35 ans et qu’il s’est délogé de son emplacement. Je me dis qu’ils vont appeler le gars de la maintenance qui changera l’interrupteur.

Cinq minutes plus tard, le gardien m’ordonne de faire mes bagages – je déménage. QUELLE GALERE ! Je déteste changer de cellule, vous n’imaginez pas à quel point ! Et ce qui se passe dans ce trou à rat, c’est qu’on n’a jamais son mot à dire en la matière.

Il y a la manière simple : on remballe ses affaires et ont suit docilement, ou la manière forte : cinq salopards en tenue anti-émeute vous aspergent de gaz lacrymo, pénètrent dans votre cellule, vous tabassent puis vous passent les menottes et vous trainent, alors que vous avez les yeux qui brûlent et le dos en compote, puis vous jettent dans votre nouvelle cage. Vous savez, c’est comme ces images des protestations que vous avez vues aux infos, où les policiers frappent, lancent des bombes lacrymo, et arrêtent les manifestants. C’est exactement ça ! C’est comme ça qu’ils agressent les détenus depuis toujours, mais je m’éparpille.

Je décide d’adopter la manière simple pour mon déménagement. A 16 heures, on m’installe dans une autre cellule de cette unité. Tout va bien pour moi, je m’adapte à tous les environnements où je suis incarcéré, donc pas de soucis. Le soir arrive, je passe un moment sympa à discuter avec mes tout nouveaux voisins.

A 18 heures, les gardiens sont de retour. On me dit que je dois encore changer de cellule. Ils font sortir un détenu de la population de droit commun de sa cellule, on m’attribue la sienne puis on laisse une cellule vide entre la mienne et celles de la population de droit commun. Je ne suis pas installé depuis 5 minutes qu’on m’annonce que je dois remballer mon paquetage ! C’est pas une blague. Alors, on nous emmène, moi et mes affaires, de l’unité C à l’unité A, puis on me conduit à la cellule N°14 – dans l’antichambre de la mort, là où vivent les gars en attente de leur exécution. Je suis on ne peut plus sérieux !

Maintenant, c’en est fini de jouer au petit ours bien docile. Il n’est PAS question que je reste dans une cellule équipée d’une caméra de surveillance 24h/24. Seulement, alors que je suis dans la salle commune, le responsable vient me parler et me dit qu’ils vont réparer la porte de mon ancienne cellule et que je pourrai regagner l’unité C avant qu’il ne quitte le travail le jour-même, à  17h30.

Donc, je pénètre dans la cellule 14. Ils arrivent toujours à vous faire accepter un peu plus que ce à quoi vous étiez prêt à consentir.

Je m’installe dans la cellule 14, toutes mes affaires sont dans des sacs ; il est 18h30. Je suis à côté de Ruben Gutierrez et quelques cellules plus loin se trouve Carlos Trevino. Au bout de la rangée, il y a aussi Billy Wardlow. Je connais ces gars depuis 20 ans maintenant. Nous prenons tous le temps de discuter et de nous saluer. Ils sont incrédules et me charrient quand je leur raconte mes péripéties et me lancent que leur section était un passage obligé pour leur rendre visite ! Tout ce que je peux faire, c’est secouer la tête et m’asseoir sur la couchette métallique.

Assis dans cette cellule, je ne peux m’empêcher de me demander pourquoi… Pourquoi est-ce qu’un événement pareil, qui doit arriver maximum une fois dans une vie, me tombe dessus tout à coup ? Et puis surtout, pourquoi est-ce que l’ennemi s’évertue à ce point à me faire lâcher prise ? Qu’est-ce qui m’attend à la prochaine étape ? De quelle chance, de quel miracle veut-il me priver ? Pourquoi déploie-t-il tant d’efforts pour me faire trébucher si prêt du but ?

Parce que les règles sont ainsi : on traverse des épreuves, on perd la foi, tout espoir disparaît, puis le miracle tant convoité vous échappe. Le truc, c’est que je connais les règles de ce jeu qu’est la vie, jamais je ne capitulerai. Pas question que je ploie sous le fardeau et que je perde la foi. Ce foutu diable ferait mieux de quitter la partie s’il pense me faire craquer. Parce que ça n’arrivera pas. C’est précisément maintenant que je suis particulièrement vigilant et tente de prévoir l’inattendu. C’est maintenant que je reste assis sans bouger, que j’ai les oreilles grand ouvertes, que je médite, que je prie, que je fais bien attention que rien ne me fasse exploser en plein vol.

Midi arrive, Ruben sort répondre à un appel téléphonique de son avocat. Il est à une semaine de sa date d’exécution programmée. Quand il revient, il nous détaille la stratégie de son avocat. A mon humble avis, il a des arguments solides, on verra s’il obtient un sursis.

Je sors mon poste de radio et écoute les nouvelles, tout en continuant de retourner dans tous les sens dans ma tête  ce qui m’arrive. De temps à autre, je ris moi-même du côté surréaliste de la situation.

Je me poste contre la porte et Trevino me dit que j’aurai de la chance si je suis transféré aujourd’hui. Le dernier gars à qui la mésaventure est arrivée est resté coincé ici toute une semaine ! Et bien sûr, il éclate de rire ! Ah ah !

Vers 15 heures, je commence à m’inquiéter. Lorsque le gardien passe par là, je lui demande d’appeler le responsable pour voir ce qui se passe. Il accepte et environ une heure plus tard, il me dit que l’escorte est là pour mon transfert. C’est un petit miracle et, posté devant la cellule, je me moque de Trevino tout en regardant les gardiens charger mon paquetage sur le chariot. Je souhaite bonne chance à tous les gars et nous quittons l’unité et retournons au bloc C. Vingt-quatre heures plus tard, après avoir changé de cellule 4 fois, je suis de retour dans mon ancienne cellule. Il est 16 heures. Et ce n’est pas fini, je dois encore remettre en ordre tout mon petit univers ! Quelle journée ! Que de péripéties !

 

Journal de bord, 13 & 14 mai 2020

Journal de bord, 13 & 14 mai 2020

13 mai 2020

Chanson: “Silver blue and gold” par Bad Company

https://www.youtube.com/watch?v=xdvI4G11eBk

“Le jour où on sème la graine n’est pas celui où on mange le fruit.” Jennifer Garner

J’ai l’impression que le temps file comme l’éclair et ça me va. Lorsque j’arrive à me concentrer une matinée, une heure, un moment, je donne le meilleur de moi. Je tiens à distance tout ce qui pourrait détourner mon attention, et avance sur ce que je dois faire. J’ai reçu plein de messages d’affection et de soutien au cours de la semaine et j’en suis reconnaissant. J’ai reçu des serments d’amitié renouvelés et c’est génial. C’est la base de mon combat, c’est de là que je tire toute ma force. Ces amis me touchent profondément. Ils sont à l’opposé de ces potes auto-centrés des bons jours, qui sont là quand tout va bien, que l’esprit est à la fête. Seulement, quand les choses se corsent, plus personne ne répond à l’appel. Avez-vous déjà remarqué ça ? Mais comme le veut l’adage, ce qui ne vous tue pas ne vous rend que plus fort. Je devrais mesurer trois mètres et avoir un corps d’acier alors. Haha!

Je trouve satisfaction à semer les graines que j’espère récolter à l’avenir. Mon mantra c’est: “ne lâche rien!”. Une fois que j’ai fait tout ce que je pouvais, à ce moment-là, je relâche la pression , fais un break et passe à autre chose. Comme écrire des lettres, écouter des émissions à la radio, peu importe. Et puis, j’y retourne. Je sais que tant que je fais ma part, que je m’en remets à l’Univers, tôt ou tard, je serai en mesure de récolter ce que j’ai semé et de goûter aux fruits ! Je souris à cette pensée qui me donne envie de continuer.

Le 15 mai 2020

Chanson: “3rd degree” par Eric Clapton

https://www.youtube.com/watch?v=67XVd005zxQ

“Peu importe votre moral ou votre état de fatigue. Levez-vous, habillez-vous, mettez-vous en route, et n’abandonnez jamais.” Coalition de prévention des addictions.

Au cas où vous ne le sauriez pas, il est difficile de bien dormir en prison ou dans le couloir de la mort du Texas. Les gardiens vont et viennent, ouvrent et ferment des portes ; ils vous braquent leur lampe-torche sur le nez quand vous dormez, ça ne s’arrête jamais. Et puis, il y a les prisonniers qui choisissent de dormir la journée, et qui crient et font du bruit toute la nuit. Le petit-déjeuner est servi à 3 heures du matin la plupart du temps, soit environ 2 heures après que je sois tombé de sommeil après une journée passée à travailler ici. Donc si on veut manger, on doit déjà se réveiller.

Alors, bien souvent, on peut dormir dans un tel brouhaha pendant 6 heures et se réveiller en se sentant épuisé. Je n’ai jamais su veiller toute une nuit et dormir le jour. Certaines personnes y arrivent, moi non. Je dors quand je suis censé dormir. La nuit. Ma motivation s’en ressent. Parfois, je ne suis pas complètement au top, mais je fais du mieux que je peux. Ces jours-là, je me force à me lever. Je mets tout en place dans ma cellule, j’enfile mes baskets et les vêtements du magasin de la prison : un T-shirt blanc et un short blanc, et la journée commence. Pour moi, il n’y a pas d’alternative. Je suis d’accord à 100% avec la citation du jour. Vous savez, c’est quand on doit faire ce qui est nécessaire, que l’on soit dans le couloir de la mort du Texas ou chez soi, confiné, à cause du Covid-19. On doit se mettre en route, ne jamais abandonner !

 

Journal de bord, 8-10 mai 2020

Journal de bord, 8 mai 2020

Chanson: “Drift away” de Dobie Gray

https://www.youtube.com/watch?v=NIuyDWzctgY

“Rien n’est impossible. Le monde lui-même dit que je suis possible.” Audrey Hepburn

Je me remémore une réflexion que j’ai partagée avec un.e correspondant.e dans une lettre, lorsque cette crise liée au Covid-19 a démarré. C’était : “je suis fait pour survivre à la fin du monde”. Et vous savez quoi ? C’est vrai. J’en suis persuadé. Il y a deux jours, la Cour d’appel du Texas en matière criminelle a rejeté mon appel axé sur la thématique de l’hypnose. Ce résultat n’était pas complètement inattendu. On savait qu’il existait au moins une chance sur deux que cela arrive, depuis que l’ancien juge de Dallas, acquis à l’accusation, avait recommandé que le recours sur la question de l’hypnose soit refusé. Il a littéralement suivi la recommandation du procureur mot pour mot. Il a fait un “copier-coller” de ses conclusions. C’est donc à ce moment-là que l’on a perdu, il y a 18 mois. Il aura juste fallu tout ce temps pour voir la cour d’appel entériner la requête de l’accusation, elle-même validée par le juge ! Voilà, c’est fait. Maintenant, nous devons passer à l’étape suivante. Vous allez voir ce que vous allez voir à la prochaine séquence, je ne vous dis que ça. La façon dont procède l’Univers est étonnante. Pile une semaine avant le rejet de mon appel, mon équipe juridique et moi sommes parvenus à obtenir la nomination de ma super-héroïne d’avocate comme avocate principale à la Cour Fédérale. Pour résumer, elle incarne la VERITE et l’avoir pour me défendre signifie que le travail est fait aux trois quarts, donc, tout va bien. Quoi qu’il arrive à partir de ce point, je ne m’inquiète pas car j’ai une équipe de défense fantastique. Je crois que, pour une raison quelconque, l’heure pour moi de quitter cet endroit n’est tout simplement pas encore venu, et je l’accepte. Ce que j’accepte volontiers aussi, c’est que l’Univers m’ait fait le cadeau d’être défendu par l’avocate et l’amie sincère dont j’ai besoin pour naviguer sur ces eaux troubles et m’en extirper. Parce que nous avons un plan, alors, tenez-vous bien et ayez confiance, continuez d’avoir la foi. Cette décision me coûtera quelques années de plus dans cette cage, mais ça me va. Parce que j’ai la force nécessaire pour ça, et pour affronter tous les autres obstacles qui se dresseront sur mon chemin !

Journal de bord, le 9 mai 2020

Chansons: “Cisco kid” & “Lowrider” par WAR

https://www.youtube.com/watch?v=iu_YVswb3p4

https://www.youtube.com/watch?v=qMkwuz0iXQg

“Lorsque l’on s’applique à faire preuve de gratitude, la vague de déception disparait et la vague d’amour nous submerge.” Kirstin Armstrong

Tout à coup, plein de choses sont arrivées ! Jeudi, ces bas-de-plafonds ont levé le confinement médical parce qu’il s’est avéré que les deux tests positifs au Covid-19 l’étaient à cause des anticorps, et donc, que les personnes testées étaient guéries du Covid-19! Du coup, c’est le retour à la normale ici, je vais bientôt sortir pour ma « promenade ». C’est intéressant. Vendredi, il y a deux semaines, j’avais un appel téléphonique de mon avocate qui m’annonçait la grande nouvelle que j’attendais : notre seconde requête pour obtenir le remplacement de mon principal avocat auprès des instances judiciaires fédérales avait été accordée. Je le savais ! A la seconde où l’escorte a fait irruption à ma porte, sans préavis, je savais que c’était G. et que nous avions décroché cette victoire. Il aura fallu s’y reprendre à deux fois. La première fois, notre demande s’est soldée par un refus. Une année de patience aura été nécessaire pour voir ce miracle se réaliser. Jeudi dernier, cette même intuition m’a dit que c’était Ben qui m’appelait, le directeur du cabinet d’avocats qui me représente. Et je savais qu’une  mauvaise nouvelle m’attendait. Je le savais, c’est tout. Alors, ce n’était ni une surprise ni un choc. Il aura fallu à ces barbares quatre années pour m’octroyer un sursis dans mon affaire en 2016, puis pour valider le rejet de mon appel en 2020. C’est le genre de délais avec lequel nous devons composer. Jeudi matin, j’ai compris et j’ai accepté que le moment n’était tout simplement pas encore venu pour moi, qu’une deuxième tentative serait nécessaire pour atteindre notre but dans le cadre de mon appel. Je sais que vous êtes nombreux à être sous le choc, à être consternés par ce qui est arrivé. S’il vous plaît, ne soyez pas désemparés, moi, je ne le suis pas !

Je connais les détails de notre dossier, nous préparons notre réplique et je vous promets que  nous avons du lourd, du très lourd. Tout le monde en sera bouche bée lorsque les faits seront présentés et mis à l’implacable lumière du jour ! Et je suis accompagné de ma remarquable équipe de défense, nous sommes prêts pour la bataille, prêts à faire éclater la vérité, donc tout va bien ! Je veux que vous aussi, vous preniez cette décision avec sang-froid, j’en ai besoin ! Parce que lorsque vous êtes forts, je le suis moi aussi. C’est lorsque l’on est concentré sur l’objectif, que l’on a la foi et que l’on y croit qu’on atteint ses objectifs. Merci pour vos encouragements, ils me galvanisent. Votre force et votre soutien me rendent encore plus fort et m’aident à garder la foi.  Et ainsi, nous arriverons au but. Et je suis en plein dans cette incroyable tempête que subit le monde tout entier. Ce dont je suis le plus reconnaissant, c’est de cette vague d’amour et de soutien que chacun continue de m’envoyer. Cette mauvaise nouvelle qui a fait irruption dans ma vie se trouve balayée par cette quantité phénoménale d’énergie positive, cette déferlante d’affection et de compassion. C’est la raison pour laquelle je parviens à dépasser cette déception, à reprendre mon souffle et à retourner illico dans l’arène. Alors, je tiens à vous redire à quel point vous êtes importants dans ma vie, à quel point votre force m’aide à rester fort. Alors, gardez cette force, rester courageux et ne doutez jamais que tout ira bien. De mon côté, je fais tout mon possible, je suis gonflé à bloc. Je suis complètement concentré sur l’objectif. Je sais ce que nous devons faire et je m’en occupe. Encore une fois, nous avons notre super héroïne d’avocate avec nous, sans parler des autres membres  de l’équipe. Croyez-moi, si je ne suis ni inquiet ni angoissé, alors que c’est ma peau qui est en jeu, vous pouvez respirer un grand coup et garder votre sang-froid. Parce que je suis maître de moi de mon côté! J’espère que ces quelques réflexions aideront chacun à gérer ce qui m’arrive. Moi, je fais face. Avec vous tous à mes côtés, je peux affronter tout ce que je rencontrerai en chemin.

Journal de bord, le 10 mai 2020

Chanson: “Grandma’s hands” par Bill Withers

https://www.youtube.com/watch?v=TdrChyGb574

“Dieu ne pouvait pas être partout, c’est pour ça qu’il a créé les mères.” Proverbe juif.

Aujourd’hui,  c’est la fête des mères aux Etats-Unis. Alors, je pense à ma mère, et aussi à ma grand-mère. Personne ne vous aimera jamais comme une maman. Je me souviens de ma mère qui me disait combien elle m’aimait, qui me répétait que personne ne m’aimerait jamais comme elle. Je le savais déjà à l’époque et j’en suis encore plus convaincu à présent. J’ai eu la chance d’avoir ma mère adorée pendant 49 années de ma vie, et bien qu’elle soit partie depuis un peu plus d’un an maintenant, je l’aime plus que jamais. J’entends encore le son de sa voix dans ma tête, sa façon de prononcer mon prénom, je me rappelle comme elle me répétait, encore et encore, qu’elle m’aimait. L’amour d’une mère est précieux sans aucun doute. Je souhaite que ce jour de fête des mères se passe aussi bien que possible, que toutes les mamans se sentent uniques et reçoivent un supplément d’amour et tout le respect qui leur est dû en ce jour particulier. Je donnerais n’importe quoi pour pouvoir avoir ma maman ici avec moi encore et lui rappeler comme je l’aime, comme j’ai besoin d’elle et comme je l’estime.

Je remercie Dieu d’avoir pu tenter d’exprimer ces sentiments tant que j’ai eu ma maman ici, avec nous. Lors de ses visites, et dans ses lettres, Maman me disait qu’une fois qu’elle serait partie, elle voulait que je me rappelle toujours qu’elle m’aimait énormément.  Et c’est le cas. Je le sais et je m’en souviendrai toujours. Je sais à quel point c’est une chance de ressentir l’amour d’une mère.

Bonne fête à toutes les mamans.