« Avec ce langage de lune »

DES NOUVELLES DU COULOIR DE LA MORT                           LE 15 SEPTEMBRE 2018.

« AVEC CE LANGAGE DE LUNE »

Admettre quelque chose.
A tous ceux que vous voyez, vous dites « Aimez-moi ».
Bien sûr, vous ne le faites pas à haute voix, sinon, quelqu’un appellerait les flics.
Cependant pensez-y, à ce grand élan qui nous pousse à créer des liens. Pourquoi ne pas devenir celui qui vit avec une pleine lune dans chaque œil, qui dit toujours, avec ce doux langage de lune, ce que tous les autres yeux dans ce monde meurent d’envie d’entendre?  » – Hafiz

Depuis environ deux jours, je m’interroge sur une question fondamentale : « Qui suis-je ? Quelle est ma nature profonde comme être humain ? Quel est mon rôle dans l’univers ? Comment dois-je vivre ? » Alors que je réfléchis à ces questions et cherche des réponses, il me vient à l’esprit une question plus cruciale encore : « Que veux-je vraiment ? »

Je crois que la réponse à cette question exigera de moi que je plonge en moi-même et analyse mes aspirations, mes espoirs et mes besoins les plus essentiels, que je réfléchisse à ce qui me rend heureux. Parce que nous sommes tous définis par ce qui nous rend heureux et la réponse à cette dernière question m’aiguillera pour répondre à la première.

A première vue, la réponse à cette question pourrait sembler simple ou bien l’on pourrait croire qu’elle est facile à trouver. Nous voulons tous être riches, beaux, minces ou célèbres. Seulement, si l’on creuse ces réponses, une vérité absolue apparaît. Si nous voulons être riches, c’est parce que nous croyons qu’on pourra acheter l’amour. Si nous voulons être beaux et minces, c’est parce que si on est «parfait » physiquement, alors, on trouvera le véritable amour. Et nous désirons être connus pour la même raison, car alors, c’est le monde tout entier qui nous aimera !

Je crois que plus que tout, nous aspirons tous à aimer et à être aimé en retour. Rien au monde n’est plus fort qu’être aimé, qu’avoir un être qui accepte cet amour qu’on a à lui offrir. L’amour est tellement essentiel à notre bien-être que nous essayons de combler le manque en nous si nous en sommes dépourvus grâce à la drogue, à l’alcool, à la nourriture et à toutes sortes d’autres choses… Grâce à l’amour, nous sommes tout et s’il vient à manquer, nous ne sommes rien.

Savoir ce que l’on veut vraiment dans la vie compte énormément pour notre santé en général. Lorsque l’on sait ce que l’on veut vraiment dans la vie, nous nous mettons automatiquement à œuvrer pour le bien, ce qui a des effets bénéfiques à la fois pour soi et pour les autres. Parce que, lorsque l’on sait ce qui nous rend vraiment heureux, il n’y a pas de conflit entre nous et les autres. Et lorsque nous sommes véritablement heureux et aimé, nous avons la possibilité de faire preuve d’amour et de bienveillance envers les autres, même lorsqu’ils cherchent à nous nuire ou qu’ils nous veulent du mal.

A l’inverse, lorsque nous nous méprenons sur nos véritables besoins et que nous pensons que l’envie, l’agressivité, l’indifférence  nous aident à atteindre nos objectifs, alors, nous nous faisons du mal et nous en faisons aussi à ceux qui nous entourent. Croyez-moi lorsque je vous dis cela – je sais de quoi je parle.

Cela fait maintenant 20 ans que je suis dans le couloir de la mort du Texas et lorsque je repense à la personne que j’étais lors de mon arrivée, je ne crois pas que je savais ce que je voulais vraiment ni ce dont j’avais besoin pour être heureux. Et malheureusement, tant d’autres âmes qui souffrent dans cet enfer sont perdues dès lors qu’il s’agit d’identifier leurs désirs ou leurs besoins. Et il est pour ainsi dire impossible de tenter « d’éclairer » un autre gars buté du couloir de la mort du Texas sur ses besoins véritables. On est tous têtus, de vraies têtes de pioche, c’est bien en partie à cause de ça qu’on s’est retrouvé ici.

Découvrir ce que l’on veut vraiment constitue une leçon de vie qu’il nous faut presque toujours apprendre seul. Et avec un peu de chance, à un moment donné, la vérité vient à nous.

Je pense parfois aux liens que j’ai tissés quand j’étais plus jeune, avant d’être envoyé dans le couloir de la mort du Texas. Je repense comment, déjà à l’époque, lorsque j’aimais quelqu’un, qu’il s’agisse d’un membre de ma famille, d’un ami ou d’une petite amie, je me sentais poussé à faire des choses pour lui ou pour elle – pour lui montrer mon amour à travers des actes. Avant même que je sache ce qui se passait,  j’étais déjà poussé par le besoin de tenter d’exprimer mon amour à travers des actes. Pourquoi est-ce que j’agissais ainsi ? Maintenant, je sais que c’est parce que je veux que les autres soient heureux, c’est pour moi un besoin.

Si mes proches sont heureux, alors, je suis heureux et à la base, cette réalité me montre que je suis quelqu’un d’aimant. Qu’en tant qu’humains, nous sommes des êtres aimants parce que la quasi-totalité de l’humanité partage ce sentiment, à des degrés divers. Alors, c’est vrai pour la société dans laquelle on vit, que ce soit dans le monde libre, dans notre communauté, ou ici, dans ma microsociété, dans le couloir de la mort du Texas. Et qu’est-ce que cela nous dit sur nous-mêmes ? Que nous ne sommes pas isolés et que notre bien-être et que celui de ceux qui nous entourent sont interdépendants.

Voilà les conclusions auxquelles j’arrive alors que je réfléchis à la vie dans le couloir de la mort du Texas. Chaque jour, je tente de vivre ce que je prêche, soit la bienveillance et la compassion. Et comme vous pouvez l’imaginer, là où je vis, il y pas mal de chacals qu’il est extrêmement difficile d’aimer et auxquels il est très compliqué de montrer de la bienveillance ou de la compassion. Et il en est quelques uns que je n’aime pas du tout. Mais c’est ainsi que fonctionne le monde en général – c’est facile d’aimer ceux qui nous aiment en retour. Ce qui forge le caractère, c’est de montrer de la bienveillance et de la compassion à ceux qui rendent cette tâche ardue et de ne pas tenter de nuire ou de vouloir du mal à ceux que l’on n’aime pas. A la place, j’essaie d’être le meilleur possible chaque matin en démarrant la journée par de la méditation et des prières. J’envoie  à chaque âme qui souffre dans le couloir de la mort du Texas comme dans tous les couloirs de la mort du monde une énergie positive et apaisante et la force et le courage de surmonter ce qu’ils traversent. Puis, j’envoie cette même énergie aux personnes du monde libre. Et cette démarche modeste renferme un incroyable pouvoir de guérison. Ses bénéfices sont doubles car cette énergie aide ceux à qui je l’envoie, amis ou ennemis, et elle m’aide aussi moi, parce que ce qui vous fait du bien me fait du bien à moi aussi.

Ce monde serait globalement plus vivable si on était davantage à apprendre à communiquer avec ce merveilleux et incroyable langage de lune !

AMOUR, PAIX ET ESPOIR !

Charles Don Flores N°999299

Couloir de la mort du Texas

Le 15 septembre 2018.

Note : Hafiz est un poète, philosophe et mystique persan qui vécut au 14ème siècle à Chiraz. Il est connu pour ses poèmes lyriques, les ghazals, qui évoquent des thèmes mystiques du soufisme en mettant en scène les plaisirs de la vie.

On peut interpréter le poème de Hafiz comme la tendance que nous avons à chercher l’amour dans le monde & l’invitation à être aussi celui qui offre l’amour, à être la lune qui brille avec la lumière abondante du soleil.